81 - La forteresse royale de Penne l'Albigeois.
Au coeur de l'Albigeois, suspendue au-dessus des gorges de l'Aveyron, la forteresse de Penne se dresse fièrement sur un impressionnant éperon rocheux qui domine le village et ses environs. Semblant défier les lois de l'équilibre, ce château longtemps à l'abandon renaît aujourd'hui de ses cendres et permet aux visiteurs de découvrir ce joyau de l'architecture militaire dont la seule vue dissuada de nombreux assiégeants.
Afin de gagner la forteresse nous traversons le charmant vieux village de Penne qui compte actuellement moins d'habitants qu'il n'y en avait au moyen-âge. Sur la place de l'église, nous franchissons la porte du pont qui permettait autrefois l'accès à la citadelle.
L'histoire du château de Penne remonte au XI eme siècle il est mentionné pour la première fois alors que les Capétiens règnent sur le royaume de France. C'est l'apparition des premiers grands châteaux en pierre avec des donjons. Le château changera plusieurs fois de propriétaire et après deux mises à sac du bourg par des compagnies protestantes, la population sera autorisée à utiliser ses pierres pour reconstruire leurs maisons incendiées.
Laissée à l'abandon, la structure de la forteresse sera mise à mal, pillée durant plusieurs siècles servant même de carrière. Elle sera ainsi dépossédé d'une grande partie de ses pierres.
L'oeuvre sera sauvée de la destruction en 1953 par la consolidation de ses ruines jusqu'en en 2006 ou le sieur Axel Letellier architecte du patrimoine s'en portera acquéreur. Le site sera dès lors patiemment restauré et finira par rouvrir ses portes en l'an de grâce 2010 pour le plus grand bonheur des visiteurs.
Un chemin nous guide du bas de la forteresse jusque une première cour intérieure. Le long du chemin de hautes murailles rendaient le cheminement difficile car les assiégées pouvaient jeter toutes sortes de projectiles sur des assaillants à découverts et sans grande liberté de mouvement. Nous débouchons sur la basse-cour qui à l'époque était occupée de maisons qui servaient à loger les personnes qui participaient à la vie du château.
Dans la basse-cour, en attendant le moment de la visite guidée, une sympathique frise chronologique nous en apprend plus sur l'histoire de France et de Penne en particulier.
Face à nous se dressent deux tours. Sur celle de gauche un éperon à bec permettait de dévier les projectiles.
La porterie dispose d'un système défensif remarquable. Une herse bloquait l'accès à la première porte. Si celle-ci parvenait à être franchie, les assiégeants en rencontraient une seconde. Entre les deux des créneaux et une voute dans le sas permettait de déverser sur l'adversaire ainsi coincé toutes sortes de projectiles. Attenant à cet efficace système défensif se trouvait la salle des gardes qui disposait de nombreuses archères.
A noter que l'on ne jetait pas d'huile bouillante car elle était rare et chère.
Une fois à l'intérieur nous accédons au logis d'habitation des nobles qui occupaient la partie la moins exposée aux dangers du château. Tout en bas l'Aveyron s'ecoule paisiblement avec un impressionant à pic d'une centaine de mètres de haut.
Dans les décombres des traces de son ancienne architecture seront retrouvées permettant de déterminer avec justesse ce à quoi ressemblait le site lors des siècles passés.
Une autre partie de la forteresse servait de logis aux gardes. Presque totalement détruite elle est aujourd'hui réhabilitée selon des méthodes ancestrales de construction (taille de la pierre, échafaudage en bois ou encore utilisation de la chaux). Une équipe de bâtisseurs médiévaux travaille quelques semaines par an au cours de l'été pour tenter de redonner du lustre à cette partie du château.
La Grande salle servait jadis à réunir les hommes et les femmes. On y organisait des banquets, y rendait la justice...Une esplanade jouxte la salle,offrant une jolie vue sur le village de Penne et au loin l'immense forêt de Gresigne.
Un chemin conduit à l'extrémité du château qui abritait une citerne, un donjon et une chapelle qui servait d'ultime refuge aux occupants en cas de siège. Non sécurisée, cette partie de la forteresse n'est pas pour l'heure accessible aux visiteurs.
Divers panneaux explicatifs permettent de mieux appréhender tout au long de la visite l'histoire et l'architecture du site à travers un circuit d'interprétation ludique et pédagogique.
Ayant subi les affres du temps, certaines parties en travaux sont encore à découvrir.
La visite sera aussi pour nous l'occasion de faire connaissance avec Alexandre Viguier surnommé le Terrrrrrrrrrrrrrrrrible de Penne. Ce singulier personnage aux multiples facettes a connu de nombreux fait d'armes. Lors de la visite du tsar Nicolas II le 6 octobre 1896, le Terrible part à Paris pour lui demander d'abolir l'esclavage en Russie et est interné à Sainte-Anne dès sa descente du train, avant d'être reconnu « non fou » et libéré.
Ce politicien marginal se promenait avec une lanterne censée « éclairer la justice, la nation et le monde ».
Bref, vous l'aurez compris, Penne et son château sera pour ma part une belle rencontre. Le côté évolutif de la restauration me laisse penser que si l'occasion m'en est donnée j'y retournerai avec grand plaisir dans quelques années, histoire de voir les changements et d'avoir accès à d'autres parties du bâtiment.
Merci à tous ceux qui nous aurons permis d'effectuer cette remarquable balade sous le joli ciel bleu du Tarn.